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UDRP : transfert de Mandela.org aux gardiens de la mémoire de Nelson Mandela

Les représentants de la mémoire de Nelson Mandela (The Trustees for the time being of the Nelson Mandela Foundation Trust) ont obtenu le transfert du nom de domaine mandela.org à l’issue d’une procédure UDRP administrée par le Centre d’Arbitrage et de Médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (WIPO, D2019-0372, The Trustees for the time being of the Nelson Mandela Foundation Trust v. Domains By Proxy, LLC / Rafael Trevisan, Trevis, Inc., May 15, 2019).

Le nom de domaine litigieux avait été enregistré le 26 septembre 2000. Le site était actif, mais ne faisait l’objet d’aucune utilisation sérieuse. Le site indiquait qu’il était et demeurerait “en construction pour toujours”. La seule fonction notable consistait dans la possibilité de télécharger un logiciel. Notons que le défendeur a pris la peine de répondre à la plainte UDRP pour expliquer que le nom de domaine était tiré du nom de ce logiciel “Micro Advanced Normalized Database Exploring for Long Activities” qui, compressé, donnait l’acronyme “MANDELA” ! Le site présentait également le message suivant : “Yeah, this page is under construction forever, however if you need support you always can send an email to support@mandela.org” or variations on this message”.

La demande était fondée sur plusieurs marques, à savoir :

  • “NELSON MANDELA and device”, déposée en Afrique du Sud le 29 novembre 1999 ;
  • “NELSON MANDELA”, déposée en Afrique du Sud le 4 October 2004 ;
  • “NELSON MANDELA” déposée au Royaume-Uni le 10 mai 2005 ; et
  • “MANDELA”, déposée en Afrique du Sud le 4 octobre 2004.

Par conséquent, seule la marque “NELSON MANDELA and device” était antérieure et la demande de transfert du nom de domaine reposait exclusivement sur cette marque, ce qu’a rappelé le panéliste. Cependant, ce dernier a ajouté, à raison, que “la renommée de M. Mandela en son nom était bel et bien établie avant l’enregistrement du nom de domaine en litige“.

Il n’est pas rare que les héritiers soient confrontés au cybersquattage. La jurisprudence ne manque pas d’exemples.

Le premier point juridique qui se pose est celui de l’existence même d’une marque. En effet, les personnes jouissant d’un certain niveau de célébrité n’ont pas systémattiquement le réflexe de déposer leur nom officiel, leur nom d’artiste ou autres pseudonymes à titre de marques. À titre d’illustration, les héritiers du peintre et collectionneur d’art Caillebote, qui n’avaient pas démontré l’existence d’une marque, n’avaient pu obtenir le transfert du nom de domaine caillebotte.com (“UDRP : Caillebotte.com”, egillet.com, 2016-06-07). À l’inverse, les ayants-droit de Picasso (WIPO, D2002-0496, Indivision Picasso v. Manuel M. F., August 6 , 2002, transfer with disseting opinion), de Van Ghog (WIPO, D2001-0879, Van Gogh Museum Enterprises BV and Stichting Van Gogh Museum v. M. O, October 21 , 2001) et de Chagall (WIPO, D2006-0442, Association pour la Défense et la Promotion de l’œuvre de Marc Chagall Dite « Comité Marc Chagall » v. Valery T., July 11, 2006) avaient obtenu gain de cause. Certes, dans la plupart des pays de tradition anglo-saxonne, elles peuvent bénéficier d’une marque dite de “common law”. Cependant, géographiquement et économiquement, ces territoires excluent notamment l’Union européenne, la Chine ou encore le Japon. Par ailleurs, l’existence potentielle de droits sur une marque non enregistrée (common law trademark) aux États-Unis ne garantit pas nécessairement le transfert du nom de domaine si celui-ci a été enregistrée plusieurs années avant le dépôt d’une marque (WIPO, D2014-1945, The Estate of Paul Flato v. Newcal Galleries Ltd., anuary 12, 2015 ; WIPO, D2004-0001, 2001 White Castle Way, Inc. v. Glyn O. Jacobs, March 26, 2004 ; NAF, CMG Worldwide, Inc. v. Humphrey Bogart Club, FA0302000144631, May 27, 2003)Il est donc très fortement conseillé aux célébrités, mais aussi à celles en devenir (v., par ex. à propos de l’éclosion du joueur de football Kylian Mbappé : iptwins.com, 2019-04-26), de déposer leurs marques et d’enregistrer leurs noms de domaine.

Une autre question se posent quant à la destination du site. Autrement dit, s’agit-il d’un site de fans pour des fans ? Donne-t-il lieu à une activité commerciale ? Sur ce point, il convient de se référer au résumé proposé par l’OMPI (WIPO Jurisprudential Overview 3.0, para. 2.7).

Plus rarement, en présence de plusieurs ayants-droit, des panélistes ont eu à s’interroger sur le point de savoir si les ayants-droit à l’origine de la demande de transfert du nom de domaine étaient bien ceux qui disposaient du droit de marque (WIPO, D2002-0616, The Hebrew University of Jerusalem v. Alberta Hot Rods, October 7, 2002).

En tout état de cause, nous conseillons systématiquement d’enregistrer le ou les noms de domaine qui paraissent indispensables dans le cadre d’une stratégie de communication à long terme. Le plus tôt est le mieux car il arrive que des homonymes bénéficiant d’un intérêt incontestablement légitime soient très efficaces dans la gestion de portefeuilles de marques et de noms de domaine (cf., par ex. : WIPO, D2000-1578, Dr. Werner Kupper [Executor of the Estate of The late Herbert von Karajan] and Eliette von Karajan v. Karajan Pty Ltd., February 5, 2001).

Exemples de procédures initiées par des ayants-droit :

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