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L’UDRP perfectible

Le 10 mai 2022, l’ICANN a publié un résumé des commentaires reçus dans le cadre d’une réflexion sur l’efficacité de l’UDRP (ICANN, Public Comment Summary Report Policy Status Report: Uniform Domain Name Dispute Resolution Policy, 10 May 2022 : icann.org). Plusieurs commentateurs ont relevé que, malgré les inconvénients qu’elle comporte, cette procédure constitue, à ce jour, la meilleure alternative à la procédure judiciaire. Néanmoins, la procédure UDRP est perfectible.

L’ICANN propose la synthèse suivante :

« Certaines modifications proposées à l’UDRP notées dans les commentaires incluent :

  • Modifier l’exigence d’enregistrement de mauvaise foi et d’utilisation de mauvaise foi en enregistrement ou utilisation de mauvaise foi ;
  • permettre le déroulement de la procédure dans la langue du titulaire du nom de domaine ;
  • éliminer la preuve de la mauvaise foi du titulaire du nom de domaine en tant qu’exigence obligatoire pour plainte en vertu de l’UDRP, et
  • élargir les pouvoirs des panelistes pour statuer sur d’autres recours tels que des compensations dont le remboursement des frais de procédure ».

L’ICANN omet de mentionner des commentaires non moins utiles. Trois thèmes importants méritent d’être mentionnés.

1. La nécessité de garantir une protection des indications géographiques contre le cybersquatting. Rappelons que les indications de provenance et appellations d’origine entrent dans le champ de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle (article 1er, paragraphe 2). Il est vrai que les indications géographiques ne sont pas reconnues dans le système UDRP qui exige du demandeur qu’il prouve être propriétaire d’une marque. Or, dans la plupart des États, les régimes juridiques respectifs des marques et des indications géographiques ne sont pas cumulatifs. Il n’en demeure pas moins que le marché des indications géographiques (74 milliards d’euros pour l’Union européenne, par exemple) suscite indéniablement la convoitise des cybersquatteurs. Et cessons d’être naïfs : un nom de domaine similaire ou identique à une indication géographique est rarement enregistré et utilisé de bonne foi ! 2. Une critique persistante de l’UDRP concerne également les faibles pouvoirs de tiers-décideur puisque ce dernier ne peut prononcer aucune sanction dissuasive contre le défendeur convaincu d’avoir réalisé des actes de cybersquatting. 3. Toute aussi récurrente est la question de l’identification des titulaires de noms de domaine, rendue plus ardue depuis l’entrée en vigueur du règlement générale sur la protection des données. Au-delà de l’UDRP, il convient également de s’interroger sur la possibilité de soumettre des plaintes concernant des noms de domaine relevant de procédures différentes. En effet, on observe que de plus en plus de cybersquatteurs enregistrent des noms de domaine similaires ou identiques à une marque dans des extensions ne relevant pas de la même procédure, et ce en connaissance de cause. Sur le plan tactique, un cybersquatteur a intérêt à enregistrer marque.com, marque.es, marque.eu et marque.it. Puisque ces noms de domaine relèvent de procédures différentes (respectivement UDRP, esDRP, euDRP ou ADR et itDRP), le coût cumulé des procédures concernées dépasse significativement celui d’une procédure UDRP unique. Ainsi, en investissant habilement, le cybersquatteur renforce sa position dans la perspective d’un transfert des noms de domaine, ô combien lucratif. La consolidation de procédures connexes permettrait de remédier partiellement à cette lacune. Cependant, le problème du coût demeurerait irrésolu. C’est donc vers la piste de la plainte unique qu’il faut se tourner. Un tel objectif parait envisageable à l’échelle mondiale en passant par l’ICANN. Cependant, chacun sait que les procédures au sein de l’ICANN sont particulièrement longues. Les États peuvent également s’emparer de la question et agir aux niveaux bilatéral, multilatéral ou régional. Ainsi, au sein de l’Union européenne, un tel système de plainte unique pourrait facilement être mis en place.